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Luxe

Villa Makassar, leçon Art Déco à Marrakech

By juillet 11, 2019juillet 11th, 2024No Comments

Comme Casablanca et Tanger, Marrakech a succombé un temps à l’Art Déco. Guéliz a heureusement préservé quelques immeubles et villas de cette époque, sans oublier l’atelier et la maison de Jacques Majorelle. Mais, c’est au cœur de la médina que vous attend la plus époustouflante leçon d’Art Déco. Ouvrez donc les portes de la Villa Makassar…

La porte d’entrée en cèdre et acajou annonce déjà l’esprit des lieux. Toute la demeure, qui réunit deux anciens riads de la Kasbah de Marrakech, est une ode à l’Art Déco, particulièrement celui de la période 1919-1939, la passion du propriétaire de la Villa Makassar. Cette passion, il brûlait de la partager. Aussi décida-t-il, il y a quelques années, de concevoir un écrin qui rendrait hommage aux grandes figures de ce mouvement architectural. Il n’hésita pas à parcourir le monde pour chiner meubles et objets de cette époque, quitte à réinterpréter certaines pièces qui n’étaient pas disponibles. Durant cinq années de patience et de collaboration avec les maîtres artisans de Marrakech, il transforma ces deux riads princiers en une référence Art Déco.

Et de fait, chaque élément apporte sa part à cet ensemble architectural unique : colonnes sur les cheminées, jeux graphiques sur les murs revêtus de marbre, d’onyx ou de bois de macassar, mosaïque déployant des motifs de l’école de Vienne, mobilier aux lignes pures, lampes et tapis anciens, tableaux d’époque, œuvres d’art, sculptures féminines en bronze… sublimés par un jeu de lumière qui transforme le lieu au fil des heures qui s’égrènent. Beaucoup sont signées et toutes, sans exception, ont une histoire. Mais le plus remarquable est d’avoir réussi l’alchimie parfaite entre une sublime élégance et une douce convivialité. Villa Makassar invite ses hôtes à revivre intensément cette époque où le raffinement s’inscrivait dans chaque détail de la vie.

Et la magie opère, que vous savouriez une tarte au citron meringuée façon Picasso, que vous profitiez d’un cigare dans le bien nommé salon Winston Churchill, que vous fassiez quelques brasses dans la piscine de balnéothérapie ou que vous admiriez le coucher de soleil sur la médina depuis la terrasse de la Villa. Impossible de ne pas succomber au charme du lieu, que vous soyez connaisseur éclairé d’Art Déco ou tout simplement amateur de beau. Cependant, le plus spectaculaire est sans aucun doute l’agencement des dix chambres, toutes différentes, toutes inspirées par l’un des maîtres de l’Art Déco. Comment choisir? En se laissant guider par celle ou celui qui les a inspirées.

Commençons par le peintre Piet Mondrian, réputé pour sa façon d’utiliser les couleurs primaires, et qui a inspiré à Yves Saint Laurent quelques-unes de ses robes les plus connues. Un mur complet en bois et tadelakt de couleurs rouge, bleu et jaune rappelle son travail dans la chambre qui porte son nom.

L’artiste français d’origine suisse Jean Dunand était à la fois sculpteur, dinandier, mosaïste, orfèvre, architecte d’intérieur et surtout un fabuleux laqueur. Celui dont le nom est attaché à tout jamais à la décoration intérieure des paquebots L’Atlantique et Normandie, utilisait la laque pour décorer paravents, panneaux, meubles, vases, et même quelques portraits. La laque venant d’Orient, «sa» chambre est décorée sous des influences asiatiques.

Venu s’installer au Maroc en 1915, Matteo Brondy a été fortement inspiré par les paysages de l’arrière-pays de Meknès qu’il aimait à peindre et dessiner. Il a réalisé de nombreuses et splendides affiches, d’une grande qualité graphique, qui sont toujours éditées sous forme de cartes postales. L’une de ses affiches décore la suite qui affiche son nom.

Jules Leleu, ébéniste français de grand talent, a été lauréat de plusieurs médailles obtenues aux célèbres Expositions Internationales des Arts Décoratifs. La suite qui porte son nom est meublée de deux de ses célèbres fauteuils ainsi que d’un impressionnant lit-soleil Ruhlmann en ébène de macassar.

Peintre, sculpteur et céramiste français d’un talent impressionnant, Paul Jouve était passionné par l’art animalier. «Sa» chambre, toute lambrisée d’un audacieux mélange de vert et noir, sert d’écrin à l’une de ses œuvres, un jaguar combattant un serpent. Les deux tables de chevet, habillées de serpent de mer, ajoutent à l’atmosphère envoûtante et chargée de mystère de l’espace.

La chambre-loft Sonia Delaunay, du nom de cette artiste peintre française, d’origine ukrainienne, se réfère à l’abstraction qu’elle défendait avec force. Une lithographie originale numérotée et signée, achetée à la vente aux enchères de la Mamounia, décore l’un des murs. Ce loft à l’esprit féminin et épicurien est pourvu d’un jacuzzi et d’une terrasse qui permet de profiter en toute intimité des sommets de l’Atlas.

L’artiste russe Aleksandr Rodchenko, à la fois peintre, sculpteur, photographe et designer, a inspiré une chambre plus masculine qui décline des motifs de l’école russe et expose, sur ses murs gris taupe, des tableaux chinés à Sarajevo et à Prague.

La chambre Victor Sassoon, du nom de cet homme considéré comme celui qui a exporté le mouvement Art Déco en Chine, notamment à travers l’édification du Peace Hotel de Shanghaï, ne pouvait qu’emporter son hôte vers ces contrées lointaines. Et c’est bien le cas avec un somptueux lit à baldaquin en bois de cèdre nimbé de lumière orangée issue de précieuses lampes de chevet en nacre.

La chambre Jacques-Émile Ruhlmann, ce décorateur français connu pour ses meubles précieux en palissandre, ébène de Macassar, amarante, acajou et autres essences rares, plaqués de Loupe d’Amboine de Birmanie, d’ivoire, de gaine de cuir, de galuchat, de peau de crocodile. Le superbe lit en ébène de Macassar et galuchat rappelle son travail dans la superbe Suite qui porte son nom. On y admire aussi d’élégants fauteuils, une coiffeuse d’époque, sans oublier un charmant combiné téléphonique des années 1920.

Et enfin, voici la chambre Clément Rousseau qui déploie un mobilier comme les aimait ce sculpteur, dessinateur et concepteur de meubles, réputé, lui aussi, pour l’élégance de ses conceptions aux formes pures et d’une préciosité rare grâce, notamment, aux placages et marqueteries de bois exotiques. La chambre se démarque également par son plafond sculpté reprenant le motif d’un tapis africain.

Chaque chambre, chaque pièce commune, est ainsi une ode à ce très inspiré mouvement Art Déco dont Villa Makassar vous invite à découvrir, ou plutôt vivre pleinement les multiples tendances. Une leçon d’architecture qui est aussi un fabuleux voyage dans le temps et la géographie.