Elégance, simplicité, cohérence mais aussi douceur et bienveillance sont les mots qui viennent immédiatement à l’esprit devant les créations d’Emmanuel Gallina. Entre la France, où il a commencé ses études, et l’Italie, où il a poursuivi sa formation, Gallina s’est construit un parcours international exceptionnel, ponctué de pièces devenues, déjà, iconiques. Rencontre avec un designer qui, comme ses plus célèbres inspirations, inspire l’apaisement mais aussi la force de l’évidence.
Devenir designer, était-ce une évidence pour vous?
Le design est plus qu’une évidence, c’est ma passion. Je n’ai jamais ressenti de lassitude mais, au contraire, une stimulation permanente. C’est un métier riche qui nourrit au quotidien et qui permet de conserver la même curiosité que celle que peuvent exprimer les enfants. Depuis que je suis tout petit, j’exprime ma créativité sur de multiples supports. J’ai d’ailleurs de merveilleux souvenirs dans l’atelier de mon grand-père italien, qui était tailleur. Les Beaux-Arts sont, pour moi, un terrain de liberté et d’expérimentation mais j’ai choisi, il y a longtemps, de m’exprimer en tenant compte de la fonctionnalité de l’objet, et donc du design. A 22 ans, j’ai donc pris la décision de finir mes études à Milan pour, ensuite, intégrer les plus célèbres agences de design, jusqu’à ce que je sois prêt à ouvrir ma propre agence. Ma carrière s’est construite lentement mais sûrement, avec constance et portée par une vision très claire.
Comment définiriez-vous la ligne/la touche «Emmanuel Gallina»?
J’aime faire référence à la mémoire collective, m’inspirer de pièces historiques pour les réinterpréter de façon contemporaine. Et pour cela, je veille à mettre en avant l’esprit traditionnel et artisanal, la garantie d’une certaine approche intemporelle. Je recherche aussi la cohérence, l’évidence entre lignes et fonctionnalités tout en exprimant la noblesse d’un matériau au travers de son authenticité. Je définirais ainsi la touche «Emmanuel Gallina»: L’élégance de la simplicité et la recherche de l’intemporalité.
Y a-t-il un objet, une matière, que vous aimez particulièrement travailler?
Je ne suis pas attiré par une typologie particulière mais je suis animé par une sensibilité forte pour les matières nobles et naturelles telles que le bois, le marbre, le cuir… Il est toujours riche et intéressant de découvrir la matière : comprendre d’où elle vient, comment elle est travaillée, ce qu’elle exprime. Il est également important, fondamental même, de travailler les matières avec respect. Ainsi, je fais souvent référence aux savoir-faire artisanaux, au Made in Italy et au fait main, en les mixant avec des technologies innovantes. Cette sensibilité nourrit ma manière de concevoir. J’envisage la matière comme un langage qui parle à nos sens.
Vous avez travaillé pour un grand nombre d’éditeurs. Qu’est-ce qui fait la réussite d’une collaboration?
Mon approche met le designer au service de la marque, et non l’inverse. Cela induit une qualité de dialogue et ouvre la voie à un travail constructif. Le design italien est depuis toujours marqué par cette dualité designer et industriel. L’authenticité et l’harmonie au sein des équipes font partie de mon quotidien de designer. Elles favorisent la construction de collaborations sur le long terme, voire pérennes, comme par exemple celles que j’ai établies avec POLIFORM ou AMPM, et permettent de rentrer en profondeur dans les problématiques de l’identité de la marque, ce qui est extrêmement stimulant. Peu à peu, on finit par ne faire qu’un avec l’ADN de la marque, ce qui favorise la création de solutions toujours en adéquation avec la vision de la marque. Plus qu’un projet, ce sont des rencontres qui m’ont nourri et qui se sont révélées importantes, comme Alberto Spinelli, le CEO de POLIFORM, ou encore François Bernard, entre autres directeur artistique de AMPM.
Quel est le projet qui vous a le plus marqué?
Il y a un peu plus de 10 ans, nous avons lancé la chaise Grace et la table Concorde avec POLIFORM, une marque italienne, leader international dans le mobilier contemporain haut de gamme. Ces deux produits ont été travaillés autour du concept d’intemporalité et ont eu un succès immédiat, devenant rapidement les best-sellers de la marque. En tant que créateur, ils sont ma plus grande satisfaction. Non seulement, Grace et Concorde ont rendu mon nom célèbre dans le monde entier mais, une décennie plus tard, ils sont toujours bestsellers. Ils sont même devenus iconiques pour la marque.
Quelles sont les grandes évolutions dans la manière de vivre/de concevoir les intérieurs que vous constatez sur ces dernières années?
La vie moderne est souvent stressante et harassante, malgré la multiplication des outils informatiques et des applications de service, ce qui induit un fort besoin de se ressourcer chez soi. Le designer doit donc apporter du bien-être, de la sérénité et du confort (tant fonctionnel que visuel) dans l’habitat. C’est pourquoi je travaille énormément sur l’idée de convivialité et de chaleur, avec la volonté de rendre plus simples les fonctionnalités de la maison. Il est rare de voir un angle vif ou agressif dans mes créations, c’est volontaire. Je suis persuadé que les courbes, la sensualité des lignes, le confort, la fluidité des formes… contribuent à donner une réponse concrète à cette demande de bien-être et à apporter du sens dans les produits qui construisent notre environnement.
Qu’est-ce que le luxe pour vous?
Pour moi, le luxe, c’est l’élégance de la simplicité. Dans le même ordre de pensée, Coco Chanel disait «La simplicité est la clé de toute véritable élégance».
