Du 18 mai au 20 juillet 2024, la Salle des Casques de la Fondation Montresso* accueillera les œuvres de l’artiste franco-tunisien Béchir Boussandel, Earth’s Skin.
«Pour passer de l’intellection à la vision, du relatif à l’absolu […] il faut […] se replacer dans la durée et ressaisir la réalité dans la mobilité qui en est l’essence.» Henri Bergson
L’œuvre de Béchir Boussandel est tant spatiale que temporelle. De ses visions oniriques, rendues concrètes dans toute leur abstraction sur le support plat ou volumineux de son travail, la mobilité est engagée. Le regardeur doit se déplacer pour en saisir l’essence. Véritable mise en volume de sa peinture, les territoires de Béchir Boussandel prennent une dimension immersive, s’extrayant du cadre. Territoires instables, le déplacement n’est plus horizontal, sensible au sens de lecture, mais vertical. L’artiste nous amène dans une perte de repère presque totale.
Forte attache au sol, tant dans le processus que par les suspensions marquant ce pont entre astral et terrestre, l’artiste nous redresse. Le procédé est physique, près du sol, travaillant horizontalement à donner à voir une verticalité. Entre deux lignes, le regardeur comme les flotteurs, sont entre air et eau, air et terre. Déplacement continu dont la destination est inconnue, l’abstrait devient spatialisé. Le lino se contracte, l’eau découpant les traces, accentuant les volumes, les équilibres. Tributaires des éléments, c’est pourtant un territoire utopique que Béchir Boussandel modèle reprenant possession des lieux. Les éléments se répondent, oscillent.
Monstration de nos appartenances, les grandes toiles de Béchir Boussandel se réapproprient nos démarcations intimes, nos barrières personnelles. Les moments vécus deviennent souvenirs. Comme les frontières, passages de perception individuelle, codifiées, l’écoulement du temps devient une variable personnelle, conscientisée. Récits pluriels, la ligne blanche, celle du parcellaire est contournée, le regardeur est à vol d’oiseau. Conservant ce point de repère, de l’entre-deux, la perte de repère devient le signet. La question des délimitations, de leurs passages, de mondes distincts est interrogée, comment percevoir nos appartenances, témoigner de leurs mouvances? La recherche constante de Béchir Boussandel s’incarne dans les installations au sein de sa peinture, ses réflexions sur la composition. Le temps se mesure par les éléments figuratifs cherchés par le regard, leur répétition indiquant le passage d’un territoire à un autre, rythmant l’espace.
Les temps suspendus du crépuscule, ces moments d’instabilité contrastent avec les couleurs pigmentées utilisées pour les fonds de toile, résonnant avec l’environnement dans lequel l’artiste évolue. Domptant le hasard, l’ancrage de Béchir Boussandel est celui du spatio-temporel, l’entre-deux est questionné. Le figuratif est esseulé, espace intime et espace public se croisent, laissant l’insaisissable émaner.
Entre Tunis et Paris, Jardin Rouge accueille les résidences de l’artiste Béchir Boussandel, le Maroc résonnant avec ce patrimoine immatériel, eau et soleil, si vitaux à son processus créatif. L’instant vécu, et le lieu de cette action sont un dans la perception que Béchir Boussandel nous donne à voir.
Béchir Boussandel
Né en 1984.
Vit et travaille entre Lille (France) et Bizerte (Tunisie).
Diplômé des Beaux-Arts de Dunkerque, Béchir Boussandel débute son parcours artistique dans l’installation avant de s’orienter vers la peinture.
Explorant les strates multiples d’une peinture mouvante, c’est d’abord un questionnement de la perspective qui trouve son expression dans les toiles. Bouleversant le rapport conventionnel à l’horizon, l’artiste déploie une vue d’oiseau sur des surfaces dont la matérialité relève à la fois un aspect terrestre et astral. De ces tréfonds magmatiques émergent des éléments isolés qui sans jamais se rencontrer nouent un dialogue frontal à travers les œuvres. Affranchies d’ancrage spatio-temporel, ces miniatures singulières intriguent et signifient aussi bien des réminiscences personnelles que des transpositions symboliques. Dans une tension constante entre figuration et abstraction, l’œuvre de Béchir Boussandel s’inscrit dans une interrogation continue autour du déplacement des êtres sur et à travers des territoires instables.
Représenté par la CDA Gallery à Casablanca et la Galerie Tabari Artspace à Dubaï, il a participé à la Menart Art Fair en 2023 à Paris. Ses œuvres sont exposées à travers le monde et ont intégré la collection du Ministère de la Culture et de la Jeunesse des Emirats Arabes Unis, du Musée Deji Shanghai, du Musée d’Art Contemporain Africain Al Maaden (MACAAL) et de la Fondation Montresso*.