Le parcours de cette digne représentante de la French touch est jalonné de rencontres et d’opportunités qui lui ont inspiré des créations raffinées et poétiques. Charlotte Juillard vit son métier comme une passion et fait de ses œuvres un miroir de sa conception de l’art des objets, où fonctionnalité et émerveillement ne font qu’un. Tout en poursuivant sa prolifique carrière, elle transmet également son savoir aux nouvelles générations de designers.
Qu’est-ce qui vous a incité à vous tourner vers le design ?
J’ai toujours su que je ferais un métier créatif mais je ne savais pas vraiment quelle forme cela prendrait. J’ai grandi dans le sud de la France, dans une villa de famille sur la Méditerranée dans un environnement très doux mais bien loin de la ville. Le design est arrivé tardivement dans ma vie. C’est un domaine qui ne m’était pas du tout familier jusqu’à mon arrivée à Paris et mes études à Camondo (école d’architecture d’intérieur et de design). J’ai découvert un monde mais surtout une discipline visant à créer de nouveaux objets à la fois esthétiques et adaptés à leurs fonctions. Cela regroupait mes deux plus grandes aspirations : le dessin et les objets qui m’entourent et auxquels j’ai toujours été très sensible.
Comment définiriez-vous votre style ?
Il est toujours difficile de définir son propre style mais il me semble que mon design est plutôt féminin. Je travaille beaucoup les courbes, les arrondis avec toujours un sens aiguisé du détail.
A l’échelle de l’objet rien ne peut être laissé au hasard. J’essaie, sans trop de prétention, d’apporter un peu de poésie au travers des objets que j’imagine. Dernièrement mes dessins trouvent plus de rigueur avec des lignes un peu plus brutes et assumées… j’aime aussi l’idée que mon style évolue avec la maturité et l’expérience.
Vous avez beaucoup voyagé durant votre parcours. Quelle destination ou période a été la plus inspirante ?
Je dirais sans hésitation, l’Italie… un pays où je me sens toujours très bien. J’ai eu la chance d’y rester un peu plus d’un an en résidence à la Fabrica (le centre de recherche et de communication du groupe Benetton situé près de Venise). Une période d’insouciance et de créativité absolue, la dolce vita ! J’y ai fait des rencontres déterminantes et cela a véritablement lancé ma carrière.
Vous avez multiplié les collaborations prestigieuses. Laquelle avez-vous le plus apprécié ?
J’ai beaucoup aimé la collaboration avec l’entreprise française EPV Duvivier Canapés car elle m’a ouvert au monde du «fait en France» avec le respect des savoir-faire et du patrimoine. Sinon, plus récemment, la collaboration avec la galerie Chevalier-Parsua qui réalise des tapis d’exception entièrement noués à la main a été également une très belle expérience.
Un conseil pour les jeunes designers ?
Je dis toujours à mes étudiants que c’est une profession fabuleuse mais c’est aussi un domaine difficile et sélectif. Les jeunes ont tendance à voir les paillettes du métier mais le secteur est exigeant. Il faut faire preuve d’une grande rigueur et ne pas avoir peur du travail.
Je dis toujours patience, persévérance et motivation !
Quels sont les sujets qui vous inspirent ?
Aujourd’hui je me pose beaucoup de questions sur mon rôle dans la société en tant que designer. Je veille à faire les choses qui ont du sens pour moi. Je suis très inspirée par les entreprises qui ont une longue histoire dans la création et inévitablement des véritables savoir-faire. Je pense notamment à des maisons comme Saint-Louis (pour la Cristallerie) ou Bernardaud (pour la céramique). Cela passe aussi par l’enseignement des diplômes à l’Ecole Camondo et le lien avec les étudiants qui m’apporte beaucoup et m’inspire.
Quelques indices sur vos prochains projets ?
Des choses très variées … de la lumière, une collection pour une belle entreprise familiale et française de tissu, une table à partir de matériaux recyclés…
Il faut acheter durablement et justement, cela est frustrant mais valorise aussi la profession. Il faut acheter un bel objet de temps en temps et le garder le plus longtemps possible.