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Luxe

7 questions à
Patrick Gilles et Dorothée Boissier

By septembre 10, 2015septembre 10th, 2024No Comments

© Patrick Swirc

Complémentaires, Patrick Gilles et Dorothée Boissier s’opposent et s’attirent, dissonent pour mieux se réconcilier. A deux, ils écrivent une partition où chacun y va de son propre rôle et influences stylistiques pour composer un tout. Leur approche intemporelle et foisonnante, rigoureuse et culturelle leur vaut aujourd’hui une reconnaissance internationale. Depuis 2004, ils signent de nombreux projets, des boutiques de Moncler à l’hôtel Baccarat de New York. Ils nous disent tout sur leur premier projet marocain.

 

 

Pourquoi avez-vous accepté ce projet ?
Patrick Gilles : Au début Monsieur Kabbaj nous a demandé de travailler sur les restaurants. Lors de ma première visite, il m’a emmené voir la villa témoin. J’ai commencé par les aider à recadrer les villas déjà terminées qui ne correspondaient pas à la philosophie du Mandarin Oriental. Du coup on a accepté de travailler sur la villa témoin. Je pensais que cela prendrait six mois et ça m’a pris deux ans. Cela a été un exercice difficile car il fallait composer avec des matériaux existants. A partir du moment où on a commencé à travailler sur les villas, on s’est retrouvés à faire tour le reste. Une relation de confiance s’est installée avec Monsieur Kabbaj. Cela fait quatre ans qu’on travaille sur le projet. On a encore beaucoup de travail de part les difficultés liées au chantier. La propriété étant très grande, il y a encore une aile du bâtiment non exploitée. Pour l’instant, sur les 54 villas, 22 sont ouvertes. Pascal Desprez a travaillé sur l’’architecture extérieure et sur la villa. Nous avons hérité de son travail. Nous sommes la 3ème génération…

En quoi a consisté votre travail ?
Patrick Gilles : La base architecturale était là. Nous avons fait un travail décoratif. Nous avons fait des modifications esthétiques, mais pas structurelles. En revanche, nous avons eu la main libre sur le spa où nous avons hérité du béton pur.

Dans quelle mesure vous êtes-vous inspirés du Maroc ?
Patrick Gilles : Nous sommes au Maroc, nous avons eu envie d’être dans une ambiance marocaine. Mes parents ont vécu au Maroc, mon frère est né à Casablanca, je connais donc bien le Maroc. Nous avons revisité Marrakech pour voir ce qui a été fait. L’offre est énorme. Nous sommes partis d’une analyse des lieux pour essayer de comprendre ce qui a été fait et apporter une réponse différente. Nous nous sommes demandés ce que nous pouvions apporter. Je suis un grand fan des Aman Resorts. Mais là, on était sur quelque chose d’extrêmement grand. Le spa est pour moi l’essence de ce que nous avons voulu raconter du Maroc. On est sur quelque chose de beldi dans le sens campagnard. On s’est beaucoup renseignés, on a lu beaucoup de livres, on a visité l’Atlas avec mon oncle. Le Maroc qu’on veut voir au Mandarin s’inspire de tout ça. On veut aussi que ce soit compréhensible par les occidentaux. On a utilisé les couleurs du désert, de ce qui nous entoure à Marrakech. Nous sommes très loin des mille et une nuits. Nous sommes à la campagne, dans un luxe calme, serein, simplifié. Nous n’étions pas dans la démonstration de force. L’idée était de se ressourcer dans des espaces sereins. Le jardin y contribue. Les arbres plantés au début du chantier sont déjà matures.
Dorothée Boissier : La couleur sable et les grandes ouvertures sur l’extérieur teintées de la dominante verte de la végétation luxuriante donnent l’image d’un désert vivant permettant ainsi un vrai dialogue et une grande fluidité entre l’architecture extérieure et la nature environnante. Les étangs donnent cette impression d’oasis dans le désert. Grands admirateurs de la Medersa Ben Youssef de Marrakech, nous voulions jouer dès l’entrée d’une symétrie parfaite, de colonnes et de linteaux de bois noir, de calepinages de marbre tels des Zelliges, d’un bassin doré paisible, de cheminées taillées dans des cloches de bronze et au loin la vue sur l’Atlas. Les restaurants recouverts, l’un de zelliges jaune citron et l’autre de panneaux de bambou… nous rappellent les couleurs portées par les femmes berbères.

Avez-vous travaillé avec des artisans marocains ?
Patrick Gilles : Oui, c’était pour nous obligatoire. L’avantage de notre métier c’est qu’on parle un langage universel à travers le dessin. Ce qui me plait le plus, c’est de me retrouver face à ce type de réalité. Le travail du tadelakt, de la brique font référence aux constructions de terre. On voulait faire ressortir ce côté campagnard, ce côté vieilles kasbahs, ce mix d’architecture berbère et d’architecture andalouse. On a utilisé différentes techniques marocaines mais en les épurant, en les simplifiant. On est dans la simplicité, mais pas dans le minimalisme.

Quelle est la différence entre ces deux notions ?
Patrick Gilles : Le minimalisme, c’est l’étude sur la ligne et le volume, alors que la simplicité c’est l’ornementation qui va à l’essentiel.

C’est précisément ce que vous avez réussi dans le spa…
Patrick Gilles : Le spa est un concentré de ce que nous voulions faire. Les espaces communs sont ouverts pour que les gens puissent s’y sentir bien. Dans le spa, on raconte une histoire. L’architecture de briques est à l’intérieur au lieu d’être à l’extérieur. Mais tout est mixé. On retrouve l’architecture marocaine au niveau des circulations et des couloirs. Mais on s’est aussi inspirés de la mosquée d’inspiration hispanique. Il y a un mix de savoir-faire : mosaïque travaillée en marbre plutôt qu’en zellige, tadelakt ciselé reprenant les motifs des tapis berbères…On a fait les choses de façon instinctive.
Dorothée Boissier : Le spa, moment unique, fait de volumes grandioses de briques rouges de Marrakech, a une architecture mystique où la lumière s’amuse autour des pavés de verre mordorés des cabines de massage, des moucharabiehs, des voûtes de plâtre

Comment retrouve-t-on le luxe que représente le groupe Mandarin ?
Patrick Gilles : Le luxe se traduit par le volume des villas et le fait qu’on puisse vivre de façon horizontale toute la journée. Le luxe est aussi dans le service que je trouve plus important que la décoration.
Dorothée Boissier : C’est un luxe voyageur et décontracté.